La circulation des inconscients
« Une culture se définit par cela qu’elle s’accorde à tenir pour réel. » Régis Debray
La plus grande responsabilité des journalistes correspond à la force symbolique que comporte le traitement de la nouvelle. Le choix des mots et la manière de présenter l’actualité influence la perception du récepteur, qui fondera sa compréhension du monde sur cette impression. Le sociologue Pierre Bourdieu traduit ainsi ce phénomène :
« Les journalistes jouent ainsi un rôle central parce qu’ils sont, entre tous les producteurs de discours, ceux qui disposent des moyens les plus puissants de les faire circuler et de les imposer. Ils occupent donc une position privilégiée dans la lutte symbolique, pour faire voir et faire croire. »[1]
L’âme de notre société, sa manière de représenter le monde, est donc filtrée par les médiums actuels. La responsabilité du journaliste, son devoir d’intégrité et de conscience sociale est d’une importance inestimable dans le contexte social actuel. Le journal doit se faire la contre- parole de la survalorisation des valeurs de rentabilité, de consommation et d’individualisme, qui teintent plus que jamais notre inconscient collectif. Un discours différent et plus humain doit immerger de l’absence actuelle de débat idéologique. Une réappropriation de l’espace public et une revalorisation du rôle culturel de l’informateur doivent être défendus par les journalistes.
« La culture, qui devrait nous permettre de penser par nous-mêmes, nous fait penser « culturellement » de façon conventionnelle et stéréotypée, et ainsi nous sommes soumis aux croyances et incroyances établies, aux confiances et méfiances qui sont de règle. »
Edgar Morin
[1] Texte Pierre Bourdieu, sociologue, paru dans le livre Les mensonges du Golfe, publié par Reporters Sans Frontières.
Elise Prioleau